La sécurité (La souveraineté) Énergétique!
- Kateryna Derkach
- il y a 2 jours
- 37 min de lecture
Bon, tu pensais qu'on a parlé de la politique et de la religion, après tout le reste, puis c'est fini, il n'y a plus rien à se dire.
Eh bien, pas tout à fait.
Il y a un autre sujet assez important à discuter bien franchement si jamais on veut faire le vrai tour des questions de la sécurité et de la souveraineté de ton peuple.
Surprise.
Mais, je te promets, j'ai gardé le meilleur pour la fin!
Là, on va parler des vraies affaires (et aussi de ma vraie passion très scientifico-intuitive) : L'ÉNERGIE!
L'énergie n'est pas juste un secteur parmi d'autres. Elle n'est pas simplement une ligne dans un budget ou un ministère dans un gouvernement. L'énergie est la trame invisible qui relie toutes les dimensions de notre existence collective.
Beaucoup de gens pensent que l'argent mène le monde.
Mais, c'est faux.
C'est l'énergie qui mène le monde.
Et notre savoir-faire en termes de sécurité, cohérence et performance énergétique va pas mal définir nos chances de survie et nos degrés de liberté possibles en tant que peuple dans le futur.
Littéralement toute l'économie mondiale tient sur le secteur de l'énergie.
Quand je parle de l'énergie, ça inclut toutes formes de productions possibles incluant les fossiles, les renouvelables et le nucléaire. Je parle aussi de tous les types : électricité, carburant liquide, solide ou gazeux ou plasmique. Et, je parle aussi... des énergies humaines, naturelles ou subtiles!
La vérité sur l'argent et l'énergie
Pour comprendre pourquoi l'énergie est si fondamentale, faisons une expérience de pensée:
Si tu enlèves l'argent du système, en vérité, rien ne va changer dans notre réalité partagée.
L'argent, ce sont juste des chiffres dans un ordinateur. Il n'y a pas de contrepartie dans le monde physique qui est directement liée à l'argent. L'argent est tout simplement un outil stratégique. Une construction mentale et virtuelle sur un fichier très complexe. Mais, ton économie véritable ne dépend pas de l'argent.
Si jamais je prends une baguette magique et je fais disparaître l'argent de notre système collectif, rien de grave ne va se produire. On va prendre de nouveaux bouts de papier, on va inventer de nouveaux symboles qu'on va écrire dessus pour créer un sentiment de confiance commune dans nos échanges économiques, et on va continuer à faire exactement ce qu'on faisait jusqu'à maintenant.
Ça n'aurait aucun réel impact sur notre économie, ou sur notre politique ou sur notre société. Ça serait juste comme une simple mise à jour de notre logiciel de comptabilité des communs, c'est tout.
Mais.
Si jamais je peux utiliser ma baguette magique pour protéger la Terre. Si jamais je décide que c'est le pétrole le vrai problème et je fais disparaître du jour au lendemain tout le pétrole de la terre avec ma baguette magique?
Qu'est-ce que tu penses qu'il va arriver?
Si j'enlève la source de notre énergie fossile du système du jour au lendemain, ça va nous prendre moins que 3 secondes pour faire arrêter tout le cirque complètement et même crasher l'économie mondiale dans son ensemble.
L'énergie n'a pas du tout le même pouvoir que l'argent.
L'énergie: notre dépendance fondamentale
Dans le monde d'aujourd'hui, il n'y a presque aucune activité économique que tu peux faire sans utiliser l'énergie. Tu ne peux pas avoir de ville, de nourriture, de transport, de soin de santé, d'éducation, ni de la technologie... tu n'aurais plus rien tel que tu le connais aujourd'hui si tu n'as pas accès à l'énergie.
Ton existence, ton système, ta société, et ta survie directe aujourd'hui dépendent de l'industrie de l'énergie.
Donc, c'est ça ton plus gros risque et non pas l'argent, ni les risques économiques ou géopolitiques. C'est très important de comprendre cela. Ton plus gros risque est le dysfonctionnement de ta chaîne d'approvisionnement énergétique qui soutient et assure l'entièreté de ton économie locale.
Si tu es dépendant des industries multinationales et des chaînes d'approvisionnement globales pour satisfaire le bon fonctionnement de ton réseau énergétique local, tu es dans le vrai trouble. Si c'est ton cas (et c'est quand même un peu ton cas en ce moment), tu es une pauvre marionnette à la merci des marchés internationaux financiers (qui n'ont aucune pitié pour personne) pour juste t'assurer que ton peuple puisse survivre à court terme.
La technique du village
Une des techniques les plus puissantes pour comprendre les dynamiques internationales hyper complexes, c'est de simplifier l'échelle du système qu'on observe. J'appelle ça la technique du village, et elle peut nous éclairer sur presque toutes les dimensions de la souveraineté énergétique.
Imagine que le Québec est comme un village. Les autres provinces sont des villages avoisinants. Les autres pays sont d'autres communautés plus éloignées, chacune avec ses propres ressources, besoins et traditions.
Dans le Québec d'autrefois, chaque village possédait une certaine autonomie énergétique. On récoltait le bois localement pour se chauffer. On utilisait l'énergie des rivières pour les moulins. On cultivait la terre avec l'énergie humaine et animale. L'énergie était visible, tangible, directement liée au territoire.
Cette autonomie n'était pas parfaite, mais elle créait une résilience fondamentale. Si une tempête isolait le village pendant des semaines, la vie continuait. L'approvisionnement essentiel n'était pas menacé.
Notre époque moderne a bouleversé cette logique. Aujourd'hui, nos villages modernes dépendraient entièrement d'approvisionnements extérieurs si les routes étaient coupées. Dans la plupart des municipalités québécoises, les réserves alimentaires des épiceries ne dureraient pas trois jours. Notre chauffage dépend souvent de réseaux centralisés. Nos médicaments viennent majoritairement de l'étranger.
Pour comprendre l'importance de la souveraineté énergétique, visualisons les flux d'énergie dans notre village québécois.
Entrées énergétiques :
Électricité (principalement hydroélectrique, produite au Québec)
Pétrole et gaz (importés presque à 100%)
Nourriture (importée à environ 60%)
Produits manufacturés (importés majoritairement)
Sorties énergétiques :
Électricité exportée vers les États-Unis et l'Ontario
Matières premières (bois, minerais) exportées à l'état brut
Travail et services (souvent au service d'intérêts extérieurs)
Un village résilient équilibre ses entrées et sorties énergétiques. Il contrôle l'essentiel de ses flux, particulièrement pour ses besoins fondamentaux. Il échange avec l'extérieur depuis une position de force, non de dépendance.
Dans cette métaphore, une souveraineté énergétique réussie ne signifie pas l'isolement. Les villages ont toujours commercé entre eux, et c'est souhaitable. Mais il y a une différence fondamentale entre:
L'échange par nécessité : "Je dois absolument obtenir cette ressource de toi, sinon mon village s'effondre"
L'échange par choix : "Nous avons chacun des spécialités intéressantes à partager, enrichissons-nous mutuellement"
La première relation crée une vulnérabilité existentielle et mène à des rapports de domination. La seconde construit des partenariats équitables et durables.
L'industrialisation et la mondialisation ont transformé nos villages en rouages d'une immense machine globale. Nous avons progressivement abandonné notre autonomie contre la promesse d'une abondance venue d'ailleurs.
Visualise ce changement: autrefois, un village contrôlait sa forêt, son moulin, son forgeron. Aujourd'hui, pour construire une simple maison:
Le bois vient peut-être de Colombie-Britannique
Transformé en Chine
Financé par une banque américaine
Selon des normes décidées à Ottawa
Avec des outils fabriqués en Allemagne
Et de l'énergie fournie par des entreprises multinationales
Chaque étape nous éloigne du contrôle de notre environnement immédiat. Chaque couche de complexité nous rend plus vulnérable aux chocs extérieurs.
Que se passerait-il si ton village devait soudainement fonctionner avec uniquement les ressources dans un rayon de 100 km ou seulement avec tes voisins immédiats? Pourrait-il:
Nourrir ses habitants?
Les soigner?
Les loger?
Les chauffer?
Les éduquer?
Les divertir?
La souveraineté énergétique commence par cette réflexion fondamentale. Elle n'exige pas l'autarcie complète, mais la capacité de satisfaire l'essentiel localement si nécessaire.
Certaines communautés ont déjà emprunté ce chemin. À Gussing en Autriche, une petite ville de 4,000 habitants est devenue énergétiquement autonome en quelques années. Elle produit aujourd'hui plus d'énergie qu'elle n'en consomme, grâce à la biomasse locale et aux technologies renouvelables.
Au Québec, des initiatives comme les jardins communautaires, les systèmes d'échange locaux, les coopératives énergétiques montrent que cette approche villageoise peut fonctionner à différentes échelles.
Ces exemples partagent des caractéristiques communes:
Circuits courts d'approvisionnement
Diversification des sources d'énergie
Implication citoyenne directe
Priorité aux besoins essentiels
Vision à long terme
Du village à la nation
La beauté de cette approche est son application à toutes les échelles. Les principes qui rendent un village résilient sont les mêmes qui assureraient la résilience du Québec entier:
Cartographier les flux: Comprendre précisément d'où vient notre énergie et où elle va
Réduire les dépendances critiques: Assurer la production locale des nécessités
Circulariser les ressources: Transformer les déchets en nouvelles ressources
Diversifier les sources: Ne jamais dépendre d'une seule voie d'approvisionnement
Démocratiser le contrôle: Impliquer les citoyens dans la gestion des ressources communes
Valoriser l'efficacité: Faire mieux avec moins plutôt que n'importe quoi avec plus
Chaque individu, chaque famille, chaque quartier, chaque municipalité peut appliquer ces principes à son échelle. La souveraineté énergétique n'est pas qu'une politique nationale abstraite—elle se construit à partir du citoyen.
Le village global repensé
Cette métaphore du village nous aide à percevoir différemment notre place dans le monde. Nous ne sommes pas condamnés à être des consommateurs passifs dans un système global abstrait. Nous pouvons redevenir des acteurs de notre propre développement.
Le village traditionnel connaissait ses limites et ses ressources. Il devait composer avec la réalité concrète de son territoire. Cette conscience des limites engendrait naturellement une certaine sobriété et un respect du milieu.
Notre monde hyperconnecté nous a fait perdre cette conscience. Nous avons l'illusion que les ressources viennent de "nulle part", que les déchets vont "ailleurs", que les problèmes peuvent toujours être exportés.
Une véritable souveraineté énergétique nous reconnecterait aux réalités physiques de notre territoire. Elle nous obligerait à regarder en face les conséquences de nos choix. Elle nous rendrait responsables de notre avenir.
Cette responsabilité n'est pas un fardeau—c'est le fondement même de notre liberté collective. Car celui qui ne contrôle pas ses sources d'énergie ne contrôle pas vraiment son destin.
Énergie versus Puissance
Avant, la politique était un art. Aujourd'hui, la politique est une science.
Donc, je vais utiliser la physique et les mathématiques pour t'expliquer le lien entre ton secteur d'énergie et ton pouvoir collectif.
En physique, c'est quoi la différence entre énergie et puissance?
L'énergie : c'est la capacité à effectuer un travail ou à produire un changement. La puissance : c'est le taux de transfert ou de consommation d'énergie par unité de temps.
Si j'essaie de prendre une métaphore, imagine que tu remplis un seau avec de l'eau :
L'énergie, c'est la quantité totale d'eau que tu verses. La puissance, c'est la vitesse à laquelle tu verses l'eau dans le seau.
Ce que tu achètes chez Hydro-Québec n'est pas de l'énergie. Tu achètes la puissance.
C'est aussi la même chose pour le pétrole. Même si c'est par litres que tu le paies, ce n'est pas la quantité de l'énergie brute qui importe pour toi, c'est sa capacité d'être transformée en puissance utilisable.
C'est l'accès sécuritaire, contrôlé et facile à la puissance que tu veux, pas l'énergie.
Et la puissance dépend de beaucoup de choses : et de la source originelle, et de l'infrastructure en place, et du réseau de distribution et de l'utilisateur final.
La puissance vient toujours avec une chaîne complète d'approvisionnement pour pouvoir manipuler, transporter et utiliser l'énergie là où tu en as besoin avec la bonne quantité et de façon sécuritaire.
Pour avoir de la puissance facilement et efficacement, le réseau des infrastructures en place est beaucoup plus important que l'énergie elle-même.
Tu peux trouver l'énergie littéralement n'importe où.
Tout, incluant l'air, soleil, eau ou le vide lui-même peut être une source pour extraire de l'énergie. Ce n'est pas ça le problème. L'accès à l'énergie est facile et on en a réellement à l'infini et partout. Le vrai problème, ce sont les capacités très limitées (et les inefficacités très flagrantes) de nos infrastructures pour transformer l'énergie en puissance et pour la distribuer parmi nous comme du monde.
Quand on dit que notre pays est dépendant du secteur de l'énergie ou des ressources naturelles, en réalité ce n'est pas tout à fait vrai. Si on veut être vraiment précis, ça ne veut absolument rien dire comme phrase dans la vraie vie.
Notre économie dépend du réseau de la transformation de l'énergie vers la création de la puissance qu'on peut vendre à quelque part. C'est avant tout une économie d'infrastructure (construction), de logistique (transport) et d'administration (technologie). Le pétrole lui-même est une ressource naturelle gratuite (je parie que personne n'a envoyé encore et n'enverra jamais de chèque à la Terre pour ça).
Notre économie est encore plus basée sur la mise en place des nouveaux pipelines, les camions qui roulent sans fin et les lobbys qu'il faut pour amener le pétrole jusqu'à ta voiture que sur le pétrole lui-même.
Ce sont les chaînes d'approvisionnements qui sont à la base de notre économie et non l'énergie elle-même. Comprendre cette subtilité bien comme il faut, change tout!
Tu ne verras pas ta stratégie de développement local de la même manière une fois que tu réalises que tu peux garantir d'énormes économies d'échelles tout en créant une prospérité locale si tu simplifies et régionalises tes chaînes d'approvisionnement énergétique.
En gros, tu serais beaucoup plus riche localement (tout en travaillant beaucoup moins aussi) si tu arrêtais de vendre tes ressources naturelles et ton électricité à n'importe qui, et si tu arrêtais d'investir tes retraites dans les pipelines internationales qui ne servent à rien.
Si tu mettais le même effort stratégique dans la réelle indépendance du réseau énergétique au niveau local à la place, tout le système économique serait beaucoup plus efficace, résilient, sécuritaire et même super abondant pour toute ta communauté.
Quand l'énergie libère un peuple
Une des clés principales qui a fait en sorte que la Révolution Tranquille a marché avec un aussi grand succès était la brillance de la stratégie nationale de l'énergie qui faisait partie de cette transition.
En d'autres mots, ça n'aurait jamais marché sans Hydro-Québec.
Observe la beauté élégante et l'intelligence profonde de cette approche transformative. La révolution en production d'électricité locale pour remplacer la dépendance au charbon ou pétrole canadien. L'industrialisation rapide et parmi les plus innovantes et durables dans le monde. Un réseau de distribution indépendant des Anglais. La création des emplois locaux de très grande qualité avec des patrons québécois. Interconnexion directe avec les autres secteurs d'activités industrielles. Et toute la richesse générée revient au peuple directement.
C'était tout simplement brillant et très systémique comme stratégie dans le temps. Rien à dire. OK, rien à part des nombreux désastres naturels et des déplacements forcés des peuples autochtones. La stratégie socio-environnementale serait certainement à revoir si on avait à refaire un truc pareil. Mais, à part ça, honnêtement bravo!
C'est l'énergie qui a véritablement outillé et rendu possible la Révolution Tranquille.
L'énergie était le secteur industriel qui a permis aux Québécois de se libérer des régimes d'oppressions politiques, économiques et religieuses aussi facilement et rapidement.
C'est aussi l'énergie qui leur a permis de passer si proche de leur complète souveraineté nationale.
Mais.
Ça n'a probablement pas marché aussi à cause de l'énergie.
On avait l'électricité nationale, c'est vrai, mais on n'avait pas le carburant liquide national (mais, on en voulait un peu trop pareil).
Et, c'est là qu'on s'est fait avoir. On était dépendant des Anglais pour le pétrole beaucoup trop. La raison pour les résultats du référendum dans le temps peut être expliquée aussi simplement que ça.
L'histoire énergétique humaine a toujours été une histoire de pouvoir.
Pense à chaque grande révolution : les empires agricoles qui ont dominé grâce à l'énergie humaine des esclaves. Puis la révolution industrielle avec le charbon qui a donné à l'Angleterre sa suprématie mondiale. Ensuite le pétrole qui a fait des États-Unis la superpuissance du XXe siècle. À chaque fois, ceux qui maîtrisaient la nouvelle forme d'énergie dominante prenaient les rênes du monde.
Mais bon, ça ne sert à rien de brasser le passé, à moins que ça nous serve à quelque chose de concret et d'utile aujourd'hui.
L'héritage québécois
L'histoire québécoise est super fascinante et très riche en réussites (et en faillites) presque impossibles. C'est un peuple qui a fait beaucoup d'abus systémiques certes. Mais, c'est aussi un peuple qui a fait preuve à plusieurs reprises d'un courage, d'une volonté et d'une créativité collective d'une grandeur miraculeuse, honnêtement.
C'est un peuple qui est assez fou pour croire en lui peu importe quoi. De prendre son pouvoir quand il le veut et de cocréer le vrai bonheur communautaire avec. Ils ne sont pas juste gentils avec un énorme cœur. Ils sont aussi très intelligents, courageux et des visionnaires exceptionnels.
On a beaucoup à apprendre de notre propre histoire et de nos ancêtres.
Ils ne nous ont pas laissé en héritage seulement leurs traumatismes et difficultés des colons, ils ont aussi offert des ressources et des cadeaux très précieux. Ils nous ont appris la résilience. La foi. Les valeurs de la communauté et de la nature. La survie. La curiosité. Le courage. La souveraineté. L'amour. Le respect. La bienveillance. La créativité, l'innovation et la sagesse. Et je pourrais encore continuer cette liste très longtemps.
Mais.
Ça ne sert à rien que je te lance des fleurs si tu n'es pas capable de les recevoir.
Si tu n'es pas capable de discerner logiquement ce qui marche et ce qui ne marche pas dans tes propres stratégies du passé, si tu ne sais pas comment analyser comme du monde ton propre histoire, comment honorer tes ancêtres, comment veux-tu que je t'aide pour y voir plus clairement?
Calisse Québec, réveille-toi pour vrai. Il serait temps.
Tu n'es pas fait pour du "petit pain" et tu n'es pas un esclave de personne. Je ne sais pas quel con t'a fait croire ça, mais regarde-toi dans le miroir. Regarde ce que tu as accompli déjà. Regarde comment il est beau ton peuple, ta langue, ta culture, ta nation. C'est à toi le mérite. C'est toi qui as accompli tout ça.
Il faut vraiment que tu commences à reconnaître ta véritable valeur et à jouer avec tes plus grandes forces, tes avantages stratégiques et tes pouvoirs innés.
Arrête d'essayer de faire comme les autres, arrête de suivre les directives à l'aveugle de n'importe quelle autre nation ou peuple. Tu sais déjà probablement beaucoup mieux comment le faire que tous les autres. Fais-toi confiance. Fais confiance à ta communauté. Fais confiance à ton peuple. Fais confiance à la sagesse et au potentiel collectif que tu as déjà et mise sur ça.
Sérieusement.
Arrête d'attendre un sauveur ou quelque chose d'extraordinaire arrivé d'ailleurs. C'est toi qui as probablement le plus de chance et d'expérience de montrer le chemin aux autres provinces et même pays de comment faire pour se "sauver" nous-mêmes et comment bâtir une société qui a de l'allure.
Tu as littéralement tout ce qu'il te faut déjà pour devenir un exemple sur la scène mondiale de comment transformer et bâtir des civilisations entières avec des modèles beaucoup plus innovants, durables et beaucoup plus cohérents et pour les humains et pour la terre.
Arrête de faire la victime éternelle. Ce n'est plus le moment et ce n'est plus ton rôle non plus. Dans le monde actuel et avec nos enjeux courants, tu es dans une des positions stratégiques des plus intéressantes comparées aux autres.
Joue en conséquence avec le pouvoir et les avantages que tu possèdes déjà!
Le concept du temps
"Le temps c'est de l'argent." Cette expression bien connue cache une vérité plus profonde: le temps est intimement lié à l'énergie. Et notre rapport au temps détermine fondamentalement notre rapport à l'énergie.
Dans notre économie moderne, le temps est devenu une ressource à maximiser, à comprimer, à accélérer sans cesse. Cette accélération constante est peut-être la caractéristique la plus déterminante de notre système économique—et son plus grand piège énergétique.
Notre économie ne dépend pas seulement de l'expansion spatiale (conquérir de nouveaux marchés), mais aussi de l'accélération temporelle: faire plus en moins de temps. Chaque innovation technologique qui permet de gagner du temps est célébrée comme un progrès, sans questionner où va ce temps "gagné".
Regarde ce qui s'est passé au cours du dernier siècle:
La vitesse moyenne de nos déplacements a été multipliée par 10
La vitesse de nos communications est devenue presque instantanée
Le cycle de production et de consommation s'est drastiquement raccourci
L'obsolescence des produits ne cesse d'augmenter
Mais cette accélération a un coût énergétique énorme. Plus on va vite, plus on consomme d'énergie. C'est une loi physique fondamentale.
En physique, cette relation est claire. L'équation de la puissance (P = E/t) nous montre que pour une même quantité d'énergie (E), plus on réduit le temps (t), plus la puissance (P) requise augmente.
Concrètement:
Livrer un colis en 24h plutôt qu'en une semaine demande exponentiellement plus d'énergie
Construire un bâtiment en 6 mois plutôt qu'en 2 ans nécessite bien plus de ressources
Produire une tomate en hiver plutôt qu'en été multiplie l'empreinte énergétique
L'urgence et la vitesse sont des luxes énergétiques que notre planète ne peut plus se permettre. Et pourtant, notre économie est structurée autour de cette accélération perpétuelle.
Le paradoxe est que nous utilisons l'énergie pour "gagner du temps", mais nous utilisons ensuite ce temps "gagné" pour travailler davantage afin de pouvoir payer cette énergie.
C'est un cercle vicieux qui nous maintient dans une dépendance énergétique croissante.
Prenons un exemple concret: l'automobile.
En théorie, l'automobile nous fait gagner du temps en nous permettant de nous déplacer plus rapidement. Mais quand on considère:
Le temps passé à travailler pour payer la voiture
Le temps passé dans les embouteillages
Le temps consacré à l'entretien du véhicule
Le temps perdu à cause des problèmes de santé liés à la sédentarité
Des études ont montré que la vitesse sociale effective d'une voiture est d'environ 5 km/h—soit la vitesse de la marche. Nous n'avons pas vraiment gagné de temps, nous l'avons juste redistribué différemment, tout en devenant dépendants du pétrole.
Le temps et les chaînes d'approvisionnement
Cette accélération a des conséquences directes sur nos chaînes d'approvisionnement énergétique. Plus nous exigeons de rapidité, moins nous pouvons nous permettre de dépendre de sources locales et renouvelables.
Comparons deux systèmes alimentaires:
Système industriel global: tomates disponibles toute l'année, transportées par avion ou cultivées en serre chauffée, emballées dans du plastique, distribuées via de longues chaînes logistiques.
Système local saisonnier: tomates disponibles en été seulement, cultivées localement avec l'énergie du soleil, distribuées via des circuits courts sans emballage superflu.
Le premier système offre une "liberté temporelle" illusoire (manger des tomates en janvier) au prix d'une dépendance énergétique massive. Le second accepte les contraintes temporelles naturelles et gagne en indépendance énergétique.
Notre souveraineté énergétique dépend de notre capacité à repenser notre rapport au temps.
Des communautés du monde entier redécouvrent les bénéfices du ralentissement:
Le mouvement Slow Food valorise la production et la préparation alimentaire qui respectent le temps naturel des aliments
Les villes lentes (Cittaslow) créent des environnements urbains qui privilégient la qualité de vie sur la vitesse
L'agriculture biologique et l'agroécologie travaillent avec les cycles naturels plutôt que contre eux
Ces approches ne sont pas des retours en arrière, mais des avancées vers une société énergétiquement souveraine.
Une souveraineté énergétique véritable exigerait que nous valorisions la durée plutôt que la vitesse. Cela signifie:
Concevoir des produits qui durent des décennies plutôt que quelques années
Privilégier des chaînes d'approvisionnement plus lentes mais plus résilientes
Adopter des technologies qui s'adaptent aux rythmes naturels plutôt que de les ignorer
Redécouvrir la valeur de la patience et de l'attente dans nos vies quotidiennes
L'énergie renouvelable nous donne une leçon fondamentale: elle nous oblige à respecter les cycles naturels.
Le soleil ne brille pas la nuit, le vent ne souffle pas sur commande. Contrairement aux combustibles fossiles qui nous donnent l'illusion d'une puissance constante et immédiate, les renouvelables nous réapprennent la patience et l'adaptation aux rythmes naturels.
Le sociologue allemand Hartmut Rosa parle d'"accélération sociale" comme caractéristique définissante de la modernité. Cette accélération a des conséquences directes sur notre consommation énergétique, mais aussi sur notre bien-être collectif et individuel.
Notre obsession de la croissance économique constante est intrinsèquement liée à cette accélération temporelle. Pour croître toujours plus vite, nous devons consommer toujours plus d'énergie, créant un cycle de dépendance dont il est difficile de s'extraire.
Un Québec énergétiquement souverain devrait être capable de définir son propre rapport au temps, sans le subir des marchés internationaux ou des pressions extérieures.
Repenser le temps pour notre souveraineté
En pratique, repenser notre rapport au temps pourrait signifier:
Valoriser économiquement la durabilité des produits et services
Adapter nos modes de consommation aux cycles saisonniers locaux
Structurer notre travail autour de la qualité plutôt que de la quantité
Créer des infrastructures qui fonctionnent avec les énergies disponibles localement, même si cela implique une variabilité temporelle
Le temps et l'énergie sont les deux faces d'une même médaille. Notre souveraineté énergétique dépend directement de notre capacité à nous libérer de la tyrannie de l'accélération perpétuelle.
"Le temps c'est de l'argent" pourrait être remplacé par "Le temps c'est de la vie." Cette simple reformulation changerait profondément notre rapport à l'énergie.
Car si le temps est de l'argent, nous sommes prêts à brûler n'importe quelle quantité d'énergie pour en "gagner". Mais si le temps est de la vie, nous chercherons plutôt à l'habiter pleinement, à le vivre en harmonie avec les rythmes naturels et sociaux qui nous entourent.
Une société qui valorise le temps-vie plutôt que le temps-argent sera naturellement plus économe en énergie, plus résiliente et ultimement plus souveraine.
Cette transformation de notre rapport au temps n'est pas qu'une question philosophique—c'est peut-être la clé la plus fondamentale pour toute stratégie énergétique durable et souveraine.
Quantité versus Efficacité
Voilà où se cache peut-être le plus grand mensonge de notre économie moderne : la confusion entre quantité et efficacité.
Notre modèle économique actuel est fondamentalement basé sur la quantité des infrastructures et des ressources énergétiques, et non sur leur efficacité. Et c'est une erreur fatale.
Pour le dire clairement : « Produire plus ou utiliser mieux? » C'est le choix fondamental qui se présente à nous. Aujourd'hui, nous avons toujours une économie basée sur le principe de "produire plus". Notre vision partagée devrait plutôt s'articuler autour de la question d'"utiliser mieux".
Penses-y un instant.
Notre économie dépend littéralement du degré de notre inefficacité et de notre incohérence systémique, et non de notre performance réelle. C'est complètement absurde, mais c'est la vérité : on fait plus d'argent si le système n'est pas optimisé que s'il est réellement résilient et performant.
C'est le côté pervers de notre économie, qui dépend de la création de valeur superficielle et de l'investissement dans les "middlemen" inutiles plutôt que dans la qualité des échanges économiques.
On pense qu'il est préférable d'avoir une économie de production de masse basée sur l'obsolescence programmée et une industrie hyper complexe de gestion des déchets, plutôt qu'une économie de service basée sur la maintenance, le partage et les réparations. Une économie basée sur le produit (exploitation des ressources naturelles) et non sur les services et la durabilité.
Ma mère me disait souvent : "On n'est pas assez riche pour se permettre d'acheter autre chose que la qualité." Au début, je ne comprenais pas ce que ça voulait dire. Ça m'a pris plus de 5 ans de carrière en développement durable pour comprendre l'essence derrière ces mots.
La qualité véritable est toujours un investissement plus intéressant que la simple quantité.
Ça coûte beaucoup moins cher d'acheter une bonne paire de bottes un peu plus chère que tu peux porter pendant 10 ans et les réparer chez le cordonnier s'il faut, que d'acheter une paire de bottes cheap que tu vas jeter dans les poubelles à chaque année.
Un autre exemple pour illustrer ce point pourrait être l'alimentation.
Le bilan économique de la malbouffe coûte peut-être moins cher en épicerie que la nourriture saine de qualité. Mais tu vas aussi certainement avoir une dépense pour les traitements ou médicaments à un moment donné qui va s'ajouter à ta facture alimentaire.
Tu paies moins cher en argent sur le coup pour mal manger, mais tu mets ta santé en jeu en même temps. Tu finis par payer pour tes maladies encore plus que celui qui a payé plus cher pour bien manger. Au bout du compte, ça te revient beaucoup plus cher de mal manger.
Mais, tu ne le réalises même pas.
Parce que tu n'as aucune idée comment l'économie fonctionne. Et, personne ne te l'explique comme du monde. Parce que beaucoup de très grands professionnels sont encore très intéressés à ce que tu continues à mal bouffer. Parce que ton ignorance et tes maladies leur font beaucoup d'argent en réalité.
Ton état de santé véritable peut aussi provoquer des crises économiques dans beaucoup trop de secteurs.
Quand on a bâti l'économie entière sur la maladie et non sur la santé, et notre but est de toujours croître de façon exponentielle, ne t'étonne pas alors pourquoi tu es si malade comme peuple. C'est assez logique. Si tu es en santé pour de vrai, ton PIB va chuter plus vite que les étoiles filantes.
C'est exactement la même chose, le même non-sens, avec notre système énergétique.
La surconsommation est une stratégie plus qu'excellente pour stimuler nos ventes en énergie comme jamais.
L'obsolescence programmée crée beaucoup de profits à court terme aux entreprises manufacturières, de transport et minières. Mais, ça crée encore plus de bonheur et de richesse à l'industrie de l'énergie.
C'est vrai que c'est intéressant pour nos fichiers Excel, mais c'est quand même ridicule.
C'est nous tous aussi qui finissons par payer le coût social, naturel et humain énorme pour une telle incohérence et un tel non-sens systémique.
Vers une économie du « mieux » plutôt que du « plus »
N'importe quel idiot peut développer une économie du « plus ».
Il suffit d'extraire davantage, de produire davantage, de consommer davantage, de polluer davantage, d'abuser les autres davantage. Mais, il serait temps de trouver des nouvelles manières plus intelligentes, plus respectueuses et plus sages de faire les affaires ensemble.
La véritable valeur, la véritable abondance, se trouve dans notre capacité à être suffisamment intelligents pour trouver des façons de faire mieux.
Utiliser notre sagesse et notre intelligence collective pour construire les chaînes d'approvisionnement les plus efficientes possibles et développer notre expertise dans ce domaine.
À quoi ressemblerait une version québécoise d'une économie du « mieux » plutôt que du « plus » ?
Chaînes d'approvisionnement locales : Les plus courtes et les plus efficientes possibles, surtout pour répondre aux besoins fondamentaux de la population. Pense à des serres urbaines utilisant la chaleur résiduelle des bâtiments, des micro-usines de quartier fabriquant des pièces à la demande, des réseaux d'échange et de partage qui maximisent l'utilisation de chaque objet.
Infrastructures multifonctionnelles : Au lieu de construire des routes qui ne servent qu'au transport, imagine des corridors énergétiques qui combinent transport, production d'énergie, communication, gestion de l'eau et agriculture.
Économie de la fonctionnalité : Remplacer la propriété par l'usage. Tu n'as pas besoin de posséder une perceuse qui reste inutilisée 99,9% du temps, tu as besoin de pouvoir percer un trou quand nécessaire.
Système alimentaire régénératif : Des fermes qui, au lieu d'épuiser les sols, les régénèrent. Des cultures qui produisent plus avec moins d'intrants, moins d'eau, moins d'énergie.
Culture de la réparation et de l'amélioration : Un vaste réseau d'artisans et de techniciens capables de réparer et d'améliorer constamment nos biens, au lieu de les remplacer.
Ce virage représente une transformation culturelle profonde. C'est passer d'une mentalité de :
Génération minimale de valeur avec utilisation maximale de ressources À Génération maximale de valeur avec utilisation minimale de ressources
Cette économie du « mieux » serait fondée sur le travail réel, la puissance créative et l'intelligence des personnes, et non sur l'exploitation des ressources naturelles, la fabrication de produits jetables ou la construction d'infrastructures inutilement complexes.
Quelles sont nos limitations actuelles pour réaliser cette vision?
Principalement nos propres croyances et nos habitudes. Notre dépendance psychologique au modèle de croissance. Notre peur du changement. Notre difficulté à valoriser ce qui ne se mesure pas facilement en dollars.
Mais nous avons aussi des opportunités extraordinaires : notre patrimoine hydroélectrique, notre vaste territoire, notre niveau d'éducation élevé, notre tradition d'innovation sociale, notre capacité à nous mobiliser collectivement quand nous le voulons vraiment.
Regardons aussi où sont les principales inefficacités dans notre système collectif actuel :
Transport : Nous déplaçons des tonnes de métal pour transporter quelques kilogrammes de chair humaine. Nos voitures individuelles restent immobiles 95% du temps.
Bâtiments : Nous chauffons encore des passoires énergétiques en plein hiver québécois, comme si l'énergie était illimitée.
Alimentation : Nous jetons entre 30% et 40% de la nourriture produite, tout en important la majorité de ce que nous mangeons.
Fabrication : Nous produisons des objets conçus pour devenir obsolètes, créant des montagnes de déchets impossibles à traiter.
Une stratégie provinciale du « mieux faire » commencerait par s'attaquer méthodiquement à ces inefficacités, en créant des emplois de qualité dans la transition, tout en libérant progressivement notre économie de sa dépendance aux ressources extérieures.
La stratégie de "faire plus" c'est du pur gaspillage des ressources partagées et naturelles.
Si on basait notre économie sur la véritable efficacité et la performance systémique plutôt que sur l'obsolescence programmée et les marchés financiers fictifs, on serait tous plus riches, plus en santé, et on travaillerait tous une fraction du temps qu'on passe actuellement à travailler.
On ne passerait pas notre vie à survivre et souffrir, mais bien à vivre et à en profiter.
Cette transformation n'est pas juste une question d'environnement, c'est une question fondamentale de souveraineté. Car un peuple qui consomme quatre fois moins d'énergie pour le même résultat est quatre fois moins vulnérable aux crises énergétiques mondiales.
Il est quatre fois plus souverain et beaucoup plus abondant en santé et en bonheur véritable.
Leçons géopolitiques
Tu veux que je te dise un truc que tu ne voudrais peut-être pas entendre?
Est-ce que tu sais pourquoi la Russie n'avait absolument rien à foutre des sanctions économiques imposées par des marchés internationaux? OK, ils y avaient peut-être quelque chose à foutre un peu, mais quand même pas assez pour avoir très peur ou pour être intimidés par les autres.
Les sanctions économiques n'étaient pas une mesure qui les mettait en danger réel quelconque au niveau national.
D'une certaine manière, il y a des chances que les sanctions aient même aidé la Russie à gérer sa propre corruption beaucoup plus facilement et efficacement. Mais, son peuple là-bas, sa politique interne n'était pas vraiment affectée dans leur vie quotidienne.
C'est aussi exactement la même raison pour laquelle la Chine meurt de rire en ce moment avec les histoires de tarifs. Eux aussi, ils s'en foutent complètement. Ils n'ont absolument rien à perdre dans cette guerre économique au niveau mondial, que à gagner.
La différence fondamentale entre la stratégie politique en Russie (ou en Chine) et au Canada (ou en Europe) se trouve dans leur degré de dépendance de l'économie locale aux marchés étrangers.
S'il le faut, ils ont accès à la réelle souveraineté collective au niveau du pays. Ils ne dépendent de personne d'autre pour pouvoir nourrir, soigner, éduquer et faire prospérer leur communauté localement. Ils ont les ressources, l'expertise et l'infrastructure en place pour subvenir aux besoins fondamentaux de leur peuple à l'intérieur de leur propre territoire.
Même si demain l'entièreté de l'économie globale crashe, les Chinois et les Russes vont survivre et s'adapter assez facilement à cette réalité avec très peu de difficultés ou d'effort. Ils ont les chaînes de valeurs locales en place pour pouvoir garantir leurs besoins de base. Leur économie locale est assez stable, fonctionnelle et prospère pour s'arranger de garder leur peuple heureux, en sécurité et en santé.
Mais, pour nous par exemple, ce n'est pas du tout la même histoire.
Nous, on n'est pas encore tout à fait prêts. Notre économie locale risque de s'effondrer en même temps que la globale. On est trop dépendant au niveau de nos besoins fondamentaux des marchés et des chaînes d'approvisionnements à l'échelle internationale.
À l'heure actuelle on n'a pas d'infrastructure et l'approvisionnement nécessaire au niveau régional pour répondre aux besoins primaires de notre propre peuple comme il faut. Pour pouvoir manger, se loger, s'éduquer et se soigner au Québec, on est à la merci de l'économie mondiale qui est très volatile, fragile et imprévisible.
La fondation d'une vraie souveraineté
Ni le Canada, ni le Québec n'ont accès à une véritable souveraineté et sécurité collective sur les besoins fondamentaux de leur peuple.
Si ta capacité de nourrir ton peuple dépend plus de combien de pétrole tu peux vendre à l'international que de la qualité des jardins et la disponibilité réelle de la nourriture que tu as sur ton propre territoire, tu es déjà foutu.
La base d'une civilisation performante en santé et en sécurité véritable est très simple.
Tu veux un Canada libre?
Assure-toi que tu peux avoir une économie locale complètement souveraine de la géopolitique internationale. En gros, ça veut dire que tu dois être en mesure de pouvoir satisfaire tous les besoins fondamentaux de l'entièreté de ta population dans les limites de ton territoire géographique seulement.
Quand tu as ça, tu peux dire que tu es souverain pour vrai.
Tu veux un Québec libre?
Eh bien, la même chose s'applique ici aussi. Si tu arrives à satisfaire tous les besoins de ton peuple localement sans dépendre des ressources naturelles (ou économiques), ni des chaînes d'approvisionnement du Canada ou d'ailleurs, toi aussi tu pourrais être libre et souverain comme jamais.
Local et global
Il y a une nuance très importante que je dois préciser dans cette contemplation.
Les gens pensent souvent que c'est un choix à prendre. Local ou global. Si tu es pour l'économie locale, ça veut dire que tu te coupes du monde et tu ne collabores plus avec personne d'autre à l'international. Tu deviens isolé des marchés internationaux. Mais, ce n'est pas du tout vrai.
Le fait que tu as une économie locale véritablement souveraine, sécuritaire, efficace et résiliente ne t'empêche aucunement de faire des affaires avec les autres. C'est bien le contraire. Tu serais un collaborateur et un négociateur encore plus intéressant et puissant sur la scène du commerce international si tu sais comment te tenir debout, sans les conseils (ou les ordres) de tes amis américains ou européens.
Tu veux toujours faire des affaires avec les autres pays, et ça va probablement rester comme ça. Les échanges économiques entre les peuples vont toujours exister. Mais tu ne veux pas que le bien-être de base ou la survie de ton peuple soit directement dépendant de tes affaires à l'international.
Jouer à la géopolitique à l'international, c'est un peu comme jouer au poker.
Tu peux très facilement tout perdre. Et, tu peux tout perdre très rapidement.
Si tu joues au poker en mettant comme mise de fond un million de trop que tu as, tu n'auras pas le même plaisir ni les conséquences potentielles à jouer que si c'est ta nourriture et ta maison qui sont en jeu.
Et ça, ça fait toute la différence.
C'est la base de toute stratégie de négociation et de la gestion des risques.
Donc, la vraie question que beaucoup de pays se posent en ce moment est :
Si jamais je perds dans cette guerre économique à l'internationale, est-ce que je vais pouvoir survivre comme pays et peuple ou non?
La réponse à cette question va définir les grandes lignes de la stratégie nationale. Si un pays a besoin des autres pour survivre, il va être intéressé à promouvoir et à continuer la guerre. Rendu là, ça serait une question de survie. Tu aurais besoin de la guerre pour pouvoir manger tout simplement.
Quand tu vas en guerre parce que tu n'as pas le choix, parce que sinon tu crèves de faim, ce n'est pas du tout la même chose que si tu vas en guerre pour avoir quelque chose de plus, mais que ta survie directe ne dépend pas de ta victoire à cette guerre.
Une fois que tu comprends cela, tu comprends les stratégies militaires, les intentions et les visions internationales de tous les peuples beaucoup plus facilement.
Tu comprends pourquoi l'Europe et le Canada ne sont pas intéressés à arrêter les guerres.
Et, tu comprends aussi pourquoi les pays qui ont une véritable stabilité et sécurité nationale n'ont littéralement aucun intérêt de faire la guerre. Ils veulent faire du commerce international, mais ils n'ont pas besoin d'utiliser la violence ou la corruption pour le faire.
Auto-suffisance!
Le prérequis nécessaire et obligatoire au concept de la souveraineté quelconque est l'auto-suffisance.
Si tu n'es pas auto-suffisant (en énergie et en ressources) pour pouvoir survivre comme société et peuple sans l'aide quelconque des autres nations, tu n'es pas libre peu importe ce que tu crois, ce que tu votes et ce qui est écrit sur la page web de ton gouvernement. Tu es un peuple dépendant du système global et ta survie locale dépend des politiques internes des autres populations.
Tu as continué à faire ton économie et ta politique internationale comme un vrai colon en cachette et tu t'es fait avoir.
Tu as continué à financer les guerres ailleurs pour faire plus de cash et pour plus facilement voler leurs ressources.
Tu as continué à abuser les peuples étrangers, à faire travailler leurs enfants dans les usines chimiques juste pour diminuer les coûts de productions de ta surconsommation excessive.
Tu as continué à détruire et à polluer la biosphère, l'hydrosphère, l'atmosphère et la géosphère sans aucune considération comme si tout ça n'appartenait qu'à toi.
Tu pensais que si tu crées la corruption d'ordre mondial et que tu appelles ça le commerce international (ou l'aide humanitaire), on ne se rendra pas compte de tes stratégies de colonisation un peu trop désuètes.
Ça fait des siècles que tes ancêtres font ça. Et ils ont fait ça sur littéralement tous les continents du monde déjà.
Tout le monde est au courant comment ça marche cette stratégie d'enrichissement magique basée sur la guerre, la destruction et l'abus très créatif des autres.
Mais, c'est aussi temps que ça arrête. On est tanné de te voir utiliser la violence comme un outil stratégique pour t'enrichir davantage.
Si ta richesse ou ta sécurité dépend principalement du degré auquel tu peux arriver à abuser, à corrompre et à manipuler autrui ou la Nature, tu es en réalité déjà très pauvre (et physiquement et spirituellement).
Et, tu vis aussi dans une réalité très triste et sombre, si tu as toujours aucune idée comment t'enrichir sans être un colon moderne.
Besoins
Il y a deux types principaux de besoins.
Il y a des besoins essentiels (survie) et il y a des besoins superficiels (plaisir). C'est exactement le même principe pour l'humain que pour le peuple au complet.
Et il y a aussi 2 types principaux de produits : les périssables et les durables.
Les besoins essentiels, surtout pour les produits périssables, doivent avoir les chaînes de valeurs les plus simples et les économies les plus locales possibles. C'est la stratégie la plus sécuritaire, la plus efficace, la plus durable et la plus résiliente.
Mais, pour les besoins superficiels, c'est différent, ça fait beaucoup plus de sens d'avoir une économie plus ouverte, et de faire des échanges entre les spécialités uniques à l'international.
Ça ne fait pas beaucoup de sens de faire voyager des œufs de poules à travers le pays au complet ou de faire du commerce international des œufs. C'est beaucoup plus efficace si chaque village a ses propres poules et s'occupe de ses propres œufs. L'effort total investi par rapport aux bénéfices serait beaucoup plus logique et intéressant pour tout le monde.
Par contre.
Construire une serre tropicale de grandeur industrielle dans le nord du Québec pour faire pousser des bananes locales ne fait aucun bon sens. C'est une banane qui a un coût énergétique et en ressources phénoménal pour aucune raison.
Est-ce qu'on est mieux de continuer à transporter les bananes du Sud? La vraie réponse est non, t'es pas tant mieux de faire ça.
Et, la réponse encore plus honnête serait, tu devrais peut-être considérer arrêter de manger autant de bananes si ça ne pousse pas naturellement chez toi. Il y a plein d'autres fruits, légumes et aliments locaux où tu peux aller chercher les mêmes micro-nutriments et des goûts similaires. Mais, si tu aimes autant les bananes pour en manger à chaque jour, tu devrais peut-être déménager là où ça pousse sans aucun effort.
L'économie internationale qui fait du sens se fait principalement sur les besoins de plaisir avec les produits durables. Et, non sur la nourriture, matières brutes ou les besoins fondamentaux.
Le marché vert
Notre époque a vu naître une nouvelle forme d'économie qui se prétend vertueuse: le capitalisme vert, avec son joyau de la couronne, le marché carbone.
Ces mécanismes sont présentés comme les solutions idéales aux crises environnementales, combinant la puissance des marchés avec les objectifs écologiques.
Mais pour comprendre les enjeux de souveraineté énergétique, il faut regarder au-delà des discours et examiner comment ces systèmes fonctionnent réellement.
Le marché carbone, en théorie, semble logique: mettre un prix sur la pollution pour inciter à sa réduction. Voici comment il est censé fonctionner:
Des plafonds d'émissions sont établis et diminuent progressivement
Des "droits de polluer" sont distribués ou vendus aux entreprises
Celles qui polluent moins peuvent vendre leurs droits excédentaires
Celles qui polluent plus doivent acheter des droits supplémentaires
Un prix du carbone émerge naturellement, reflétant le coût de la pollution
Cette approche semble allier écologie et économie de marché. Mais la réalité est bien différente.
Depuis l'Accord de Paris en 2015, qu'avons-nous constaté?
Les émissions mondiales de CO2 ont continué d'augmenter
La consommation d'énergies fossiles n'a pas significativement diminué
Les inégalités énergétiques se sont accrues
Une nouvelle bureaucratie massive s'est développée autour de la comptabilité carbone
Comment expliquer ce paradoxe? Pour le comprendre, il faut analyser ce que le marché carbone fait réellement, au-delà de ce qu'il prétend faire.
Le marché carbone n'est pas principalement un outil environnemental, mais un instrument de contrôle économique qui:
Centralise le pouvoir: Les règles du marché carbone sont définies par des institutions supranationales, éloignant le pouvoir décisionnel des communautés locales.
Crée une nouvelle classe d'intermédiaires: Consultants, auditeurs, traders, vérificateurs, certificateurs... Une armée de professionnels bien rémunérés dont l'existence dépend de la complexité du système.
Génère une marchandisation de la nature: L'air, les forêts, les océans deviennent des "puits de carbone" à quantifier, monétiser et échanger.
Favorise les grands acteurs: Les petites entreprises et communautés n'ont ni les ressources ni l'expertise pour naviguer dans ces systèmes complexes.
Délocalise la pollution: Les pays riches peuvent "acheter" le droit de continuer à polluer en finançant des projets dans des pays moins développés.
Concrètement, le marché carbone permet aux économies occidentales de maintenir leur consommation énergétique excessive tout en se donnant bonne conscience.
L'exemple forestier québécois et canadien
Prenons l'exemple concret du secteur forestier:
Le Canada possède environ 9% des forêts mondiales et est le deuxième plus grand exportateur de produits forestiers au monde. Entre 2013 et 2023, les exportations de bois et de biomasse vers l'Europe et l'Asie ont augmenté de plus de 40%.
Pourquoi cette hausse? Parce que ces pays peuvent comptabiliser la biomasse comme une "énergie renouvelable" dans leurs bilans carbone, même si la combustion de bois émet immédiatement du CO2, tandis que la repousse forestière prend des décennies.
C'est là que réside le paradoxe: au Québec, on décourage souvent le chauffage au bois dans les résidences en raison de préoccupations environnementales, mais simultanément, on exporte massivement notre bois pour alimenter des centrales à biomasse en Europe et en Asie. On dit à notre propre peuple que le chauffage au bois n'est pas très propre pour l'environnement. On fait même parfois des lois pour l'interdire et dire à tout le monde que le chauffage au gaz ou à l'électricité c'est mieux. Pendant ce temps, nos forêts sont vendues à l'étranger à des prix ridicules pour alimenter leurs fournaises qualifiées de "très durables" à la biomasse.
Les contrats d'approvisionnement peuvent s'étendre sur 15 à 25 ans, engageant nos ressources forestières sur le long terme. Nous ne valorisons pas nos talents uniques à grande valeur ajoutée, mais plutôt nos matières premières brutes notre sol et notre nature. Cette stratégie limite la capacité des générations futures à décider comment utiliser leurs propres ressources. Pendant ce temps, les communautés locales perdent le contrôle de leurs ressources et souffrent souvent des conséquences environnementales de l'exploitation intensive.
La comptabilité créative des émissions
Ce phénomène illustre parfaitement les failles du système:
L'illusion des frontières: La pollution est comptabilisée là où elle est émise officiellement, pas où ses impacts se font sentir.
L'arbitrage réglementaire: Les entreprises et les pays déplacent leurs activités polluantes vers les juridictions aux normes plus souples.
Le déplacement des responsabilités: Les pays riches "nettoient" leur bilan en exportant leur pollution et important des crédits carbone.
La temporalité ignorée: Les émissions immédiates sont compensées par des captures futures incertaines.
Ces manipulations comptables masquent une réalité fondamentale: globalement, nous n'avons pas réduit notre empreinte écologique—nous l'avons simplement réorganisée géographiquement et statistiquement.
L'industrie du greenwashing
Au-delà du marché carbone, c'est toute une industrie du greenwashing qui s'est développée:
Certifications multiples et confuses: Des centaines de labels écologiques aux critères opaques et variables prolifèrent.
Récits de durabilité sans substance: Des entreprises vantent leurs engagements environnementaux tout en poursuivant des pratiques destructrices.
Technologies "vertes" partielles: On met en avant la partie visible d'une technologie (une voiture électrique) en masquant ses impacts indirects (extraction des métaux rares).
Diversion par projets symboliques: De petites initiatives écologiques très médiatisées masquent l'inaction sur les problèmes structurels.
Cette industrie a créé des milliers d'emplois bien rémunérés dans la communication environnementale, la consultation, la certification et l'audit. Mais la question fondamentale demeure: ces activités réduisent-elles réellement notre empreinte écologique ou ne font-elles que la rendre plus acceptable socialement?
L'exemple des baguettes jetables
Prenons un exemple concret et absurde qui illustre parfaitement ces mécanismes: les baguettes jetables en bois.
Le Canada exporte du bois brut vers la Chine. La Chine transforme ce bois en baguettes jetables, emballées individuellement dans du plastique. Ces baguettes sont ensuite réexportées vers le Canada où elles sont utilisées pendant quelques minutes avant d'être jetées.
Ce cycle implique:
Des milliers de kilomètres de transport maritime (pétrole)
Des processus industriels énergivores (charbon chinois)
Du plastique d'emballage (pétrole)
Un produit à usage unique (gaspillage)
Des déchets à gérer (plus d'énergie)
On rase littéralement nos forêts centenaires pour les amener à l’autre bout du monde dans de gros bateaux industriels à pétrole... simplement pour produire des baguettes en bois qu'on emballe dans du plastique toxique avant de les renvoyer par bateau chez nous, où nous les utilisons dans nos restaurants plutôt que d'opter pour des ustensiles réutilisables que tu as déjà chez toi.
Tu enrichis massivement l'industrie pétrolière, forestière, manufacturière et celle du transport en mangeant ta nourriture avec des ustensiles faits en Chine à partir de bois canadien, que tu jettes à la poubelle après seulement 30 minutes d'utilisation. Et ensuite, tu te casses la tête pour savoir comment gérer tes propres déchets.
Pourtant, dans les statistiques officielles:
Le Canada peut se vanter d'exporter des "produits forestiers durables"
La Chine compte des emplois "verts" dans la transformation du bois
Les restaurants canadiens peuvent afficher "ustensiles en matériau naturel"
Est-ce vraiment ça que nous appelons une globalisation cohérente et un commerce international qui fait du sens? C'est l'essence même du greenwashing systémique: une activité fondamentalement inefficiente et polluante est présentée comme écologique grâce à une comptabilité créative et un marketing trompeur.
Le fonctionnement du marché carbone et des mécanismes de greenwashing a un coût énergétique propre considérable:
Infrastructures numériques massives: Serveurs, datacenters et réseaux nécessaires pour suivre, calculer et échanger les crédits carbone.
Voyages internationaux constants: Conférences, audits, certifications nécessitant des déplacements fréquents des experts.
Bureaucratie papier et numérique: Rapports, documents, vérifications générant une consommation significative.
Services de conseil énergivores: Bureaux climatisés, déplacements professionnels, équipements informatiques pour les armées de consultants.
Ironiquement, l'infrastructure même censée résoudre le problème environnemental est elle-même gourmande en ressources et en énergie.
Qui bénéficie réellement de ce système?
Les multinationales établies: Qui peuvent absorber les coûts de conformité et transformer les contraintes en avantages concurrentiels.
Le secteur financier: Qui a trouvé dans le carbone une nouvelle classe d'actifs à spéculer et à manipuler.
Les pays dominants: Qui définissent les règles du jeu et les imposent aux autres.
Les professionnels hautement qualifiés: Consultants, avocats, comptables, auditeurs spécialisés dans cette nouvelle économie.
Les grands perdants sont:
Les petites entreprises locales
Les communautés autochtones
Les pays en développement
Les travailleurs des secteurs traditionnels
Et finalement... l'environnement lui-même
Une alternative
Face à ce système, la vraie alternative n'est pas un autre mécanisme de marché global, mais une reprise en main locale de nos systèmes énergétiques.
Une approche authentique impliquerait:
Mesurer ce qui compte vraiment: Plutôt que des tonnes de CO2 abstraites, mesurer la santé des écosystèmes locaux, la qualité de vie des communautés, la résilience des infrastructures.
Privilégier l'action directe: Plutôt que d'acheter des crédits compensatoires ailleurs, réduire concrètement les impacts locaux, restaurer les écosystèmes locaux.
Démocratiser les décisions énergétiques: Redonner aux communautés le pouvoir de décider comment elles produisent et utilisent l'énergie.
Réintégrer les cycles naturels: Synchroniser nos activités économiques avec les cycles naturels locaux plutôt que de les ignorer au nom de l'efficacité.
Une véritable souveraineté énergétique exigerait une nouvelle façon de comprendre et de mesurer notre relation à l'environnement.
Au lieu d'une simple "taxe carbone" ou d'un "marché de droits à polluer", nous pourrions développer:
Des "budgets ressources" territoriaux qui prennent en compte toutes les dimensions écologiques (eau, air, sol, biodiversité)
Des indicateurs de résilience locale qui valorisent l'autonomie énergétique des communautés
Des systèmes d'échange et de coopération directe entre territoires, sans intermédiaires financiers
Des mécanismes de gouvernance écologique ancrés dans les réalités biologiques et culturelles spécifiques à chaque territoire
Le Québec, avec sa tradition coopérative, son patrimoine hydroélectrique déjà socialisé et son territoire riche en ressources diverses, pourrait être un pionnier dans le développement de ces alternatives au capitalisme vert globalisé.
Le greenwashing et le marché carbone ne sont pas de simples défaillances du système—ils en sont des composantes intentionnelles. Ils permettent de maintenir les structures de pouvoir existantes tout en donnant l'impression d'un changement.
Pour atteindre une véritable souveraineté énergétique, nous devons voir au-delà de ces mécanismes et revenir aux questions fondamentales:
Qui contrôle nos sources d'énergie?
Qui bénéficie de leur utilisation?
Qui supporte les conséquences de leur exploitation?
Qui prend les décisions sur notre avenir énergétique?
La réponse à ces questions ne se trouve pas dans des mécanismes de marché abstraits, mais dans une reprise en main démocratique et locale de nos systèmes énergétiques.
L'indépendance énergétique
Si tu veux une passe quasi directe vers ta sécurité et ta souveraineté nationale, c'est très simple la recette (pas facile, mais simple). Mets en place une stratégie provinciale d'une réelle indépendance énergétique de toute ton économie locale.
Si tu arrives à faire ça, tu pourrais commencer à parler de la véritable souveraineté de ton peuple. Et, si c'est le cas, si tu es véritablement libre au niveau énergétique, personne ne pourrait t'abuser, te manipuler ou te corrompre.
Si tu as l'autorité réelle sur ton énergie, tu aurais aussi tout le pouvoir dont tu as besoin. Tu serais le plus fort joueur dans cette "power game" mondiale.
Quand je parle d'énergie, je ne parle pas seulement de watts et de joules. Je parle aussi de l'énergie humaine, créative et sociale qui fait battre le cœur d'un peuple. Cette énergie-là, personne ne peut te l'enlever si tu la cultives. C'est l'énergie qui fait qu'un peuple se lève le matin avec la fierté d'être qui il est et la volonté de bâtir quelque chose de plus grand que lui-même.
L'énergie humaine et l'énergie technique sont inséparables dans une société souveraine. L'une nourrit l'autre. Des citoyens énergisés et engagés créent des systèmes techniques innovants. Et des systèmes techniques résilients libèrent l'énergie humaine pour la création plutôt que la simple survie.
En fin de compte, notre voyage à travers la souveraineté - alimentaire, éducative, sanitaire, religieuse et politique - nous amène à cette vérité fondamentale : tout repose sur l'énergie.
Sans maîtrise de nos flux énergétiques, sans infrastructures locales résilientes pour transformer cette énergie en puissance utile, nous bâtissons notre liberté sur du sable.
Nous dépendons de systèmes extérieurs qui peuvent s'effondrer ou nous être retirés à tout moment.
La véritable sécurité énergétique ne signifie pas s'isoler du monde. Elle signifie participer au monde depuis une position de force et d'intégrité - non pas en quémandeur désespéré, mais en partenaire souverain.
Des relations internationales équilibrées ne peuvent exister qu'entre partenaires qui ne sont pas désespérément dépendants l'un de l'autre. L'indépendance énergétique nous permettrait de développer des collaborations internationales basées sur le respect mutuel et les échanges équitables, plutôt que sur la domination et la nécessité.
Le Québec a déjà fait ce pari une fois avec Hydro-Québec. Il a montré qu'un peuple peut reprendre son destin énergétique en main et, ce faisant, transformer profondément son économie et sa société.
Aujourd'hui, le défi est d'étendre cette vision à l'ensemble de notre système énergétique - de l'alimentation au transport, du chauffage à l'industrie. De créer des réseaux locaux résilients qui nous libèrent de la vulnérabilité tout en nous permettant de contribuer positivement à l'économie mondiale.
L'avenir qui nous appelle
Imagine un Québec où chaque vallée, chaque village, chaque quartier pulse au rythme de sa propre énergie.
Imagine une société où le souffle du vent dans les arbres, le murmure des rivières, la chaleur du soleil sur nos toits ne sont pas seulement des poésies bucoliques, mais les fondements concrets de notre liberté collective.
Nous avons bâti des cathédrales de béton, nous avons dompté des fleuves millénaires, nous avons fait jaillir la lumière des profondeurs de la terre. N'est-ce pas la preuve vivante que nous pouvons accomplir l'extraordinaire quand nous osons rêver grand?
La souveraineté énergétique n'est pas un retour en arrière. Elle est le bond en avant le plus audacieux que nous puissions faire. Elle est l'alliance de notre génie technologique et de notre sagesse ancestrale. Elle est la réconciliation entre notre puissance créatrice et notre humilité face aux cycles naturels.
C'est là, dans cette danse subtile entre innovation et tradition, que se trouve notre véritable richesse.
Nous sommes les descendants de bâtisseurs tenaces qui ont survécu aux hivers les plus rudes, qui ont transformé des forêts impénétrables en terres fertiles, qui ont fait fleurir une culture unique sur un continent qui cherchait à l'effacer.
Et nous sommes aussi les ancêtres de ceux qui, dans cent ans, jugeront nos choix.
L'énergie est notre héritage le plus précieux. Non pas un héritage figé dans le passé, mais un héritage vivant que nous réinventons chaque jour. Un héritage qui devient promesse d'avenir quand nous le transformons avec conscience et courage.
Québec, ton corps est traversé par des fleuves puissants, ton sol regorge de richesses millénaires, ton ciel baigne dans une lumière qui pourrait alimenter mille cités. Mais ta plus grande ressource demeure l'imagination et la détermination de ton peuple.
La souveraineté énergétique n'est pas seulement une politique économique ou environnementale. Elle est l'expression concrète de notre dignité collective. Elle est ce moment où un peuple se tient debout et déclare : "Nous ne serons plus à la merci des tempêtes que nous n'avons pas provoquées."
Cette souveraineté-là, personne ne peut nous l'enlever une fois qu'elle est établie. Elle devient notre véritable puissance, notre véritable richesse collective. Elle transforme chaque foyer, chaque ferme, chaque atelier en un îlot de résilience et d'abondance partagée.
Et quand nos enfants nous demanderont ce que nous avons fait face aux défis de notre temps, nous pourrons leur répondre, le regard clair : "Nous avons choisi l'audace de l'autonomie plutôt que le confort de la dépendance. Nous avons semé les graines d'un monde où votre liberté ne dépend pas du bon vouloir des puissants."
Car c'est cela, au fond, la promesse de la souveraineté énergétique : un monde où l'énergie qui anime nos vies n'est pas un privilège qui peut nous être retiré, mais un droit fondamental que nous avons su garantir pour les générations à venir.
Et si ce n'est pas là le plus bel héritage que nous puissions laisser, alors dites-moi ce que serait une vie bien désirée et vécue.
